“Je ne jouais pas pour me refaire. Je jouais parce que j’aimais le feeling de jouer. Quand la machine s’illuminait pis que le rush d’adrénaline embarquait, y’a rien qui pouvait accoter ça.” Cette citation, tirée du film québécois Le Plongeur, m’a beaucoup fait réfléchir sur l’addiction et sur comment cela peut envahir la personne. Stéphane, le personnage principal, a une addiction aux machines à sous et au travers du film, on voit les mensonges et les manigances qu’il utilise pour avoir ce qu’il veut : ressentir le rush d’adrénaline devant les machines. Peu importe les conséquences qui pourrait en suivre, sa recherche d’adrénaline prend le dessus sur le reste.
Ce film m’a fait comprendre que je m’étais trompé sur l’addiction. Ce n’est pas pour s’enrichir en jouant à des jeux d’argent ou d’avoir un buzz grâce à une drogue quelconque, mais bien parce que le cerveau a modifié son fonctionnement pour ressentir le plus de plaisir possible durant ces activités.
L’addiction est une dépendance à une substance ou à une activité ayant des effets néfastes sur la santé ou la vie de la personne. La personne addicte peut être consciente des effets négatifs sur sa santé et son comportement, mais la recherche de plaisir est plus importante que tout le reste. On retrouve deux grandes catégories d’addiction : celle aux substances psychoactives, comme l’alcool, les drogues et les médicaments, et les addictions comportementales. On parle ici de l’addiction aux jeux de hasard et d’argent, au travail, aux écrans, à la pornographie, etc. Plusieurs conséquences peuvent en découler : déséquilibre émotionnel, apparition de problèmes de santé physique et/ou mentale, bouleversements dans les sphères personnelle, professionnelle et sociale.
Au niveau neurologique, l’addiction s’installe chez la personne en trois stades distincts, soit la recherche de plaisir, l’état émotionnel négatif et finalement la perte de contrôle.
Le système de récompense
Dans notre cerveau se trouve un système de récompense nous permettant de ressentir du plaisir lorsque nous pratiquons des activités essentielles à notre survie, comme de se nourrir ou se reproduire, et nous permet aussi d’éviter ce qui nous fait souffrir. L’hormone de bonheur qui est libérée, la dopamine, nous indique que c’est un bon comportement à refaire. Le cerveau associera alors le sentiment de bonheur à l’objet ou le comportement déclenchant la montée de dopamine. Imaginez que vous êtes affamés et que devant vous se trouve un steak cuit à la perfection. À la simple vue de ce steak, votre cerveau libérera de la dopamine car il sait que le festin s’en vient. Cela vous motivera alors à manger ce steak car vous savez qu’encore plus de bonheur vous attend.
Cette recherche du plaisir est la première étape à l’addiction. Le cerveau associe la substance ou le comportement à la décharge de dopamine et cherchera le plus possible à reproduire les conditions nécessaires pour retrouver cette sensation de bien-être.
L’accoutumance
Le deuxième stade se caractérise par l’accoutumance du cerveau à la dopamine. Le cerveau s’habitue à la dose surélevée qu’il reçoit, ce qui fait que le sentiment de bonheur est plus difficile à atteindre. Il faut donc augmenter la dose de plus en plus pour atteindre le même effet qu’au début. Une conséquence de cette accoutumance est que les autres plaisirs du quotidien ne procurent plus la même sensation de plaisir qu’avant. Seul lorsque la personne consomme la substance ou pratique le comportement addictif qu’elle va avoir ce plaisir. L’objectif de l’addiction n’est donc plus de ressentir du bonheur, mais bien de se sortir de l’état émotionnel négatif, de plus en plus présent.
La perte de contrôle
Dans le film, lorsque l’oncle de Stéphane le confronte à ses mensonges, on voit Stéphane s’écrouler en disant : “Je suis pas capable d’arrêter. C’est plus fort que moi, à chaque fois que je vois une machine je dois jouer pis je vois pu le temps passer.” Cela démontre bien le troisième et dernier stade du développement de l’addiction : la perte de contrôle. Le circuit de la récompense est tellement envahi par l’addiction qu’il devient de plus en plus difficile de résister à l’envie de consommer, même lorsque la personne est consciente des conséquences négatives qui pourrait s’en suivre. La personne est très vulnérable aux rechutes à ce stade car plusieurs fonctions cognitives sont dérèglées, par exemple :
- La prise de décision
- La motivation
- L’évaluation du risque
- L’autorégulation
- La mémoire
Qu’est-ce qu’on peut faire pour sortir de ça ?
Plusieurs études ont démontré que l’addiction est un grand facteur de risque pour développer un trouble de santé mentale, et inversement les personnes ayant un trouble de santé mentale sont plus à risque de développer une addiction (Rush et al., 2008). Mais comment peut-on briser la boucle de l’addiction ? Pour avoir du succès, il faut d’abord que la personne croit que le rétablissement est possible. Il faut reconnaître que la recherche du plaisir prend trop d’importance et amène plus de côtés négatifs que de positifs. Cette façon de voir les choses augmente les chances que la personne adhère aux traitements et psychothérapies qu’elle suivra. Le Centre de réadaptation en dépendance de Laval offre plusieurs services adaptés pour aider autant la personne que son entourage dans le processus du rétablissement. Si vous avez besoin d’aide, n’hésitez pas à venir nous voir, nous pouvons vous accompagner dans vos démarches.
Références :
https://www.inserm.fr/dossier/addictions/
Dubreucq, S., Chanut, F. & Jutras-Aswad, D. (2012). Traitement intégré de la comorbidité toxicomanie et santé mentale chez les populations urbaines : la situation montréalaise. Santé mentale au Québec, 37(1), 31–46. https://doi.org/10.7202/1012642ar