Venez manger du bonheur avec nous !

Oui, le titre peut paraître intéressant. Et qu’est-ce qu’on veut dire par là ? Personnellement, je n’ai jamais vu de recette de cuisine où l’on devait ajouter 2 tasses de bonheur. Alors donnez-vous votre langue au chat ? Non ? J’entends déjà des gens qui m’informent qu’une saine alimentation est essentielle à une bonne qualité de vie. D’autres me diront qu’ils ont la pire humeur lorsqu’ils ont le ventre vide. Vous croyez déjà avoir répondu à la question ? Pas du tout ! 

Que veut-on dire alors par « manger du bonheur » ? Commençons par le commencement. Nous suivrons ici le parcours d’un rôti de bœuf au travers d’une cuisine et nous comprendrons ce qui rend heureux. Vous doutez que la nourriture soit aussi bénéfique qu’on le prétend ? Je n’attends plus et je vous partage dès maintenant ma recette pas si magique que ça. Si vous n’êtes pas sûrs      de comprendre, vous pouvez aussi demander à un de nos 12 participants du       cours de cuisine du lundi, car la nourriture n’a plus de secrets pour eux.

Première étape : Prenez votre rôti et faites-le mariner dans un bouillon social pour au moins une heure.

Pourquoi ? Parce qu’une marinade, ça attendrit ! Même les plus grosses pièces de viande deviennent souples quand elles profitent d’un bon bouillon. Le rôti de boeuf que nous suivons dans son parcours arrive triste, anxieux et grognon. Après avoir jasé avec une cuisinière, deux stagiaires et 4 usagers, l’anxiété commence à disparaître            chair      se desserre      . Les mouvements des muscles sont plus souples, moins robotiques. Comme c’est le cas avec un humain. L     es réponses courtes de trois mots se transforment en échanges vivants et spontanés. Tranquillement, le CAFGRAF et ses usagers font leur œuvre. Comme le ventre et le corps en général sont plus détendus, la personne aura plus de facilité à manger. Avez-vous déjà essayé de manger en état avancé de stress ? Parfois, ça ne passe tout simplement pas.

Deuxième étape : Apprêtez vos ingrédients en y mettant plein d’amour !

Lorsque votre pièce de viande est bien socialisée, c’est enfin le temps d’y injecter un gros tas d’amour et d’épices (des gens préfèreront toujours l’amour bien épicé !). Facile à dire ! Voici quelques indications qui vous permettront de réaliser avec succès la deuxième étape. D’abord, prenez le temps d’observer. Plusieurs personnes sont tellement pressées de parler qu’elles ne se soucient pas de l’autre. Aimez-vous que l’on vous parle sans vous écouter ? Que l’on vous propose des trucs qui sont loin de votre réalité ou déconnectés de vos moyens financiers ? Vous n’aimez pas ça ? Personne n’aime ça ! Alors soyez attentifs aux autres comme vous aimez qu’on soit attentifs à vous. Prenez le temps de comprendre l’autre, de vous intéresser à lui. Vous ne trouverez pas que des différences, mais aussi des points en commun que vous pourrez utiliser pour débuter une discussion intéressante. J’entends plusieurs personnes partager, au CAFGRAF, qu’elles ont parfois de la difficulté à avoir de belles relations. Essayez ce truc ! C’est le plus facile au monde ! Il vous demande en fait de ne rien faire : arrêter de parler, arrêter de couper la parole et laisser      l’autre le temps de terminer sa phrase, voire son histoire.

Ensuite, si j’avais un autre conseil à vous offrir, ce serait de penser à complimenter les autres. Reprenons maintenant l’exemple de notre rôti de bœuf. Imaginez-vous en train de servir le plus magnifique rôti à tous les gens que vous aimez. Vous attendez-vous à des compliments ? Des remerciements ? Oui ? Est-ce que ça fait de vous des gens capricieux ? Des bébés gâtés ? Absolument pas ! Au contraire, c’est parfaitement normal et même très sain. C’est à coup de compliments que l’on apprend à croire en nous. Que l’on apprend à s’aimer. Que l’on apprend aussi à se laisser aimer.

Se laisser aimer ? Tout à fait ! Comme un rôti qui se laisserait manger. Sinon, dites-moi à quoi ça pourrait servir de donner tant d’attention à notre rôti, de le faire mariner doucement, de l’assaisonner selon les préférences des invités, de monter la chaleur pour le laisser cuire afin qu’il ressorte du four le plus tendre possible. Tout ça pour finalement ne pas le servir ? Idéalement, toute cette expérience se terminera donc par un partage. 

Où est-ce que je m’en vais avec tout ça ? Je voulais simplement démontrer que toute la belle expérience d’inviter des gens à la maison pour un repas, ou de le cuisiner au CAFGRAF pour une belle gang d’affamés, ne se résume pas aux 15 coups de fourchettes que nous donnons à notre assiette. En effet, j’ai déjà vu plusieurs personnes ici ressentir un plaisir authentique alors qu’ils étaient en train d’accomplir un merveilleux travail d’équipe en cuisine. Ça rit, ça crie, ça partage, ça entraide, ça bouffe et…ce n’est pas un peu le contraire de la dépression tout ça ?

Et puis, quand vous amenez au reste du groupe la belle nourriture que vous avez préparé, que vous recevez des applaudissements et des compliments, ce n’est pas un peu le contraire de la honte tout ça ?

Alors je dirais que oui, au travers d’un rôti de bœuf, on peut traiter la dépression et l’anxiété. Le remède n’est pas le rôti lui-même, mais plutôt toutes les étapes qui d’habitude font chialer les gens : on coupe les légumes (en jasant), on cuit les viandes (en riant), on apprend de nouvelles recettes (en partageant) et finalement, on sert le plat (avec fierté).

Venez donc manger du bonheur avec nous ! On ne vous le servira pas sur un plateau d’argent, tout cuit dans le bec. Pas parce qu’on est égoïstes (j’ai demandé à Luc si « égoïstes » prenait un « s » et il me dit que oui, alors pardonnez-moi si j’ai fait une faute !), mais plutôt parce qu’on a aucun bonheur déjà tout prêt. Comment ça ??? Parce qu’on a besoin de vous pour en faire. 

Continuez de venir nous voir. Continuez de venir manger avec nous. La fierté, la reconnaissance et la confiance en soi viendront vous rejoindre, tous et toutes assis à la même table !

Le cadre du continuum des thérapies expressives en art-thérapie

Le cadre du Continuum des Thérapies Expressives (CTE) en art-thérapie c’est quoi ? En art-thérapie, on utilise des médias d’art-visuels. En utilisant le cadre du CTE, les médias sont disposés sur un continuum dans le studio d’art-thérapie. C’est-à-dire qu’on dispose les médias des plus fluides aux plus résistifs. Ça veut dire quoi tout ça ? Il n’y a rien de mieux qu’une image. 

Mais encore, pourquoi du plus fluide au plus résistant ? Chaque médium peut amener dans le corps une réaction différente. Cela peut aller de l’indifférence, au plaisir, au dégoût ou encore une résistance sans raison particulière. Par exemple, la création avec l’aquarelle peut amener une émotion de lâcher-prise ou de déplaisir. Certaines personnes seront ravies de jouer avec la fluidité de l’aquarelle qui peut s’écouler dans différents sens. D’autres se sentiront désemparées, car l’aquarelle et les médiums apparentés laissent moins de place au contrôle. Un autre exemple est la création avec l’argile. Certaines personnes peuvent avoir de la difficulté à la manipuler. D’autres auront de la difficulté à apprécier sa matérialité. Plusieurs personnes seront surprises d’arriver à donner forme à ce qu’ils imaginent. Certaines personnes aimeront la malléabilité de l’argile et sa propriété pourtant solide.

Des médiums comme les crayons de couleurs, le collage ou les feutres peuvent faciliter le développement de capacités cognitives. Les thérapies expressives comprennent beaucoup plus de matériaux que ceux illustrés ci-haut. Cependant, il est important de ne pas introduire trop de médiums inconnus au début d’une série de séances en art-thérapie.1

Un aspect important de l’approche par le CTE est d’encourager la personne à explorer les médiums. Une des valeurs importantes est de créer avec ce qui est présent.  Comment la personne se sent, quelles couleurs et textures y correspondent. Avec le temps on peut introduire des matériaux moins conventionnels. Ces matériaux peuvent favoriser une expression symbolique et significative pour la personne. Les matériaux non conventionnels peuvent être du tissu, des souliers, pour confectionner un personnage ou une marionnette. Ces explorations symboliques peuvent aider à nourrir des aspects de soi avec un manque à combler. L’important est d’avoir une variété de matériaux qui peuvent nourrir les différents besoins liés à la culture. Par exemple, l’utilisation de tissus, laine ou rubans apaisent et nourrissent les besoins de type sensoriels.

On peut aussi marcher dans l’environnement immédiat pour trouver des objets qui peuvent nourrir le processus créatif. Ce processus de recherche de l’objet naturel ou autre favorise l’action. Par exemple, je marche dans le parc et je trouve une plaquette informatique de 4 pouces (oui ça m’est arrivé). Intéressant.  Comment est-elle arrivée là ? D’où vient-elle ? Qui a participé à sa création ? Je trouve une noisette, mais il n’y a aucun noisetier dans le boisé. Étrange. Quel voyage a-t-elle fait pour se rendre dans ce boisé ? On peut alors imaginer et créer l’histoire de ce qu’on a trouvé.

Vous aurez compris que tout cela explique le CTE. On peut regarder ce continuum sous l’angle de fonctions de composantes physiques et/ou cognitives. Toutes ces composantes font partie de l’expérience humaine. Cela contribue au processus créatif de différentes manières. La personne choisit de créer en fonction de ce qu’elle a besoin d’exprimer. Si le besoin est de marteler ou frapper, elle peut le faire avec un feutre et créer à partir de points successifs. Si elle a besoin de douceur, de textures, elle pourrait utiliser des textiles, de la peinture à doigts ou du pastel à l’huile travaillé avec les doigts. Un autre pourrait avoir besoin d’exprimer des émotions et utiliserait l’aquarelle. Ou encore pour changer sa perspective sur une situation, par exemple en agrandissant une image (comme si on la regardait au microscope). Dans un même processus, la personne peut avoir besoin d’utiliser un crayon pour ajouter un élément précis (passant ainsi à la composante cognitive). L’ajout d’un élément symbolique peut amener une conclusion ou une nouvelle direction à l’œuvre en cours.

INSÉRER GRAPHIQUE DE HINZ 2008 MODIFIÉ

Tout cela pour dire que le CTE est un cadre intéressant, tant pour la personne que pour l’art-thérapeute. L’outil peut permettre à la personne de mieux comprendre ses besoins et de mettre des mots sur son processus. Si au contraire la personne ne sait pas comment procéder, le cadre du CTE peut offrir des possibilités d’exploration en lien avec ce qui est présent. Ce continuum ne se travaille pas de manière linéaire ou par étape, mais plutôt selon le besoin de la personne. Ce n’est pas non plus une recette, mais plutôt un outil ou un cadre d’accompagnement. 

Tout comme avec l’art-thérapie positive2 on travaille à partir de ce qui est présent, en validant et en cherchant avec la personne. Ce qui la motive, la soulage, lui permet de voir une situation sous différents angles, susciter l’espoir et découvrir des capacités inespérées. Bref, on sort de la boîte connue, pour sauter dans l’univers de soi qu’on connaît moins. Comme dit mon collègue Maxime, pour sortir de la boîte, faut-il encore qu’il y ait une boîte ou un cadre pour contenir tout ça.

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  1. Hinz, L. H. (2020). Expressive Therapies Continuum: A framework for using art in therapy (2nd ed.). Routledge.
  2. Wilkinson, R. A., Chilton, G. (2018). Positive Art Therapy: theory and practice. Routledge.

Les effets des émotions sur l’intelligence et le potentiel de guérison

En art-thérapie, je te demande parfois d’illustrer une ou des émotions. Pourquoi exprimer visuellement des émotions ? Parce que plus on reconnaît nos émotions, mieux on peut comprendre ce qu’elles ont à nous dire et en prendre soin. 

L’art, la beauté et ses effets sur le cerveau

Les scientifiques ne sont pas encore arrivés à définir l’effet de la beauté sur le cerveau1. Cependant, ils ont des pistes. Le cerveau est capable de distinguer et de traiter ce qui est beau, par exemple, quand on apprécie l’harmonie d’un tableau, son rythme et sa composition. Le cerveau est stimulé par une émotion déclenchée par ce qui nous apparaît comme beau. En d’autres mots, c’est comme si cela allumait les neurones du cerveau. Prenons l’exemple d’une mélodie qui te plait. Même si tu l’écoutes dix fois dans une même année, elle n’aura pas le même effet sur tes neurones. Il y a plus de 600 millions de synapses (chemins ou câbles) qui connectent les neurones par millimètre cube (insérer dessin neurone 1 émotions, neurone 2 savoir tenir un crayon, donne neurone 3: exprimer l’émotion – câbles qui les relient entre eux). C’est difficile à imaginer pour un si petit espace. C’est pendant toute la vie qu’on peut agrandir les circuits du cerveau, ou reconnecter ces chemins neuronaux. C’est ce qu’on appelle la plasticité du cerveau. Plus on est stimulé par différents types de beauté, plus notre cerveau créera de nouvelles connexions entre les neurones. Pas besoin de chercher loin. La belle nature est gratuite et présente tout autour de nous. Elle stimule des émotions et des sentiments durables de calme, de plaisir ou de satisfaction.

L’expression des émotions et l’intelligence

Justement, parlons-en des émotions. Dans ma pratique artistique et d’art-thérapeute, une création peut libérer des émotions inexprimées ou des inconforts. On peut choisir d’illustrer une émotion pour voir à quoi elle ressemble pour soi. Il suffit d’entrer en contact avec l’émotion pour ressentir comment elle se manifeste dans le corps. Où est-elle ? Quelle est sa forme, ses mouvements et son rythme ? On peut ensuite la regarder avec curiosité et se demander ce qu’elle vient faire, ici et maintenant. On peut découvrir ce qu’elle cherche à dire. La pratique de l’expression des inconforts intérieurs peut amener à la conscience les émotions et favoriser leur compréhension. Avec le temps, tu développes et raffines ton intelligence émotionnelle. Donc, tu peux laisser s’exprimer l’émotion artistiquement, même si tu ne sais pas laquelle est là. Ensuite, tu peux essayer de la comprendre, pour saisir pourquoi elle est là. C’est ainsi que l’émotion contribue à l’intelligence globale du corps, et éventuellement à une prise de décision réfléchie. 

L’intelligence émotionnelle et ses effets 

L’émotion vient stimuler directement la partie réactive du cerveau. Si on ne comprend pas les émotions, celles-ci peuvent diriger nos comportements, malgré notre bonne volonté. Par exemple, tu veux arrêter de fumer. Arrive une situation stressante. Tu ne prends pas le temps d’être en contact et de comprendre le stress que ça génère. Cela engendre le besoin de fumer. Tu prends une bouffée de cigarette, malgré ta volonté de ne pas recommencer.  Si tu t’arrêtes pour comprendre le message de ton stress, tu arrives à raisonner et prendre la bonne décision pour toi. 

Et pas seulement pour soi. Se connaître émotionnellement peut contribuer au succès. En effet, l’intelligence émotionnelle des employés contribuerait à 85% du développement des entreprises2. Les médecins3 reconnaissent de plus en plus l’effet bénéfique de l’expérience artistique sur les changements bénéfiques pour soi. Lorsqu’une personne est malade, l’art-thérapie peut contribuer au processus de guérison ou d’acceptation de la maladie. Aussi, la maladie mentale est une condition physique, tout comme une jambe cassée. Le cerveau est un organe qui fait partie du corps. La personne d’avant la maladie (physique ou mentale) est encore là.  Vivre et exprimer sainement les émotions, comme la peur, la tristesse, la colère peut favoriser le processus du retour à une vie satisfaisante.

Les effets cognitifs et symboliques sur le cerveau

Si on exprime la colère avec un bloc d’argile, en le cognant sur une table et en le transformant, peu à peu le sentiment d’être envahi va diminuer. En modelant la colère qui est encore présente, on lui donnera une forme d’expression (symbolique). On peut chercher à comprendre (cognitif) ce qui s’exprime. Cela a un effet sur les chemins (synapses) qui sont formés dans le cerveau. Exprimer et comprendre peut aider à se sortir des comportements qui nuisent à ta santé mentale et/ou physique. Par exemple, les comportements qui font trop boire d’alcool, trop manger ou trop consommer de drogues. 

Ce qui est envahissant est souvent difficile à identifier et à comprendre. Par exemple, utiliser l’aquarelle (sensoriel) en tapotant (kinesthésique) permet d’exprimer doucement le trop-plein de l’affectif (émotion). Ce qui amène éventuellement à perce-voir autrement (perceptif)4. De là, on comprend mieux l’effet de l’émotion sur notre comportement (cognitif). La forme (symbolique) exprime ce que notre corps et nos émotions cherchent à nous apprendre. Avec le temps, l’image créée revient dans nos pensées. Graduellement, les images créées aident à supporter ce qui est inexprimable ou invivable. 

Par exemple, cette image illustre un moment où je ne me sentais pas bien. J’étais inconfortable avec une décision prise. J’ai pris un carton noir, pour faire ressortir ce que j’avais besoin de voir, car je ne voyais pas clair. Sur l’image abstraite, on voit une femme avec les mains et le corps tournés vers la gauche, et le regard tourné vers la droite. Cela m’a fait prendre conscience que ma pensée (décision) n’était pas alignée avec ce que mon corps ressentait. J’ai alors réfléchi à ce qui pourrait réconcilier mon corps et ma pensée. J’ai pris la même position que le personnage et j’ai réaligné mon corps. Ce mouvement m’a guidé à voir la décision appropriée pour moi. Tu as des questions, viens me voir et on pourra regarder comment tu peux t’approprier l’expression de tes émotions.

 

Références

    1. Verdo, Y. (2016) Comment l’art embrase le cerveau. Retrouvé sur le site Les Échos. https://www.lesechos.fr/2016/11/comment-lart-embrase-le-cerveau-218142
    2. Découverte Sciences (2024). Nos émotions nous rendent-elles intelligents? 38 dossiers pour comprendre Cerveau & Neurosciences, p. 72-74.
    3. Pellecchia, A., Gagnayre, R. (2006). Entre cognition et émotion : les potentialités de l’art dans l’éducation thérapeutique. Revue internationale francophone d’éducation médicale.
    4. Lusebrink, V. J., Hinz, L. (2019). Cognitive and symbolic aspects of art therapy and similarities with large scale brain networks. Journal of the American art therapy association 37(3), 113-122.

 

Présentation du Modèle Canadien du Rendement et de l’Engagement Occupationnel (MCREO)

L’ergothérapie est une profession permettant aux personnes de réaliser les occupations qu’elles considèrent comme importantes. L’ergothérapie est décrite comme étant « l’art et la science de l’habilitation de la personne à l’engagement dans la vie de tous les jours par l’occupation ; habiliter les personnes à effectuer les occupations qui favorisent leur bien-être ; habiliter les membres de la société, de telle sorte que celle-ci soit juste et inclusive afin que tous puissent s’engager, selon leur plein potentiel, dans les activités de la vie quotidienne».

Une occupation est l’ensemble d’activités et de tâches de la vie quotidienne auxquelles les individus et les différentes cultures donnent un nom, une structure, une valeur et une signification. L’occupation comprend tout ce qu’une personne fait pour prendre soin d’elle (soins personnels), se divertir (loisirs) et contribuer à l’édifice social et économique de la communauté ‘productivité). C’est l’expertise de l’ergothérapeute. (ACE, 2002). 

Les modèles conceptuels en ergothérapie

Cette profession s’appuie sur des modèles conceptuels. Ces derniers sont des outils essentiels pour guider la démarche clinique. En effet, ils permettent d’organiser les connaissances des thérapeutes, d’analyser les difficultés des clients de manière structurée et d’identifier les priorités d’interventions, dans le but de favoriser leur rendement et leur engagement occupationnel. Dans cet article, le modèle canadien du rendement et de l’engagement occupationnel sera détaillé. 

 

Le Modèle Canadien du rendement et de l’engagement occupationnel (MCREO) 

Le Modèle canadien du rendement et de l’engagement occupationnel (MCREO) est utilisé par les ergothérapeutes oeuvrant au Québec et au Canada. C’est un modèle centré sur le client. Cela signifie que les interventions visent à répondre aux besoins spécifiques de chaque individu, en tenant compte de ses valeurs, de ses objectifs et de son contexte unique. L’évaluation se fait souvent en collaboration avec la personne elle-même, garantissant une participation active dans le processus de prise de décision.

 

La personne est représentée sous plusieurs dimensions : la dimension physique (fonctions sensori-motrices, prothèse de hanche, fractures) ; la dimension cognitive (fonctions cérébrales, la mémoire, l’attention) ; la dimension affective (les émotions comme la colère, la tristesse ou la joie et les sentiments) et la dimension spirituelle (croyances, valeurs, projets de vies). Cette vision globale aide à comprendre la personne dans toutes ses dimensions, ses fonctions, ses activités, ses besoins et ses habitudes de vie.

Puisque chaque individu vit dans un contexte environnemental qui lui est propre, la personne est représentée à l’intérieur de l’environnement. L’environnement est divisé en quatre catégories : l’environnement social (les amis ou la famille de la personne, un voisin gentil) ; l’environnement culturel (la culture québécoise et canadienne par exemple) ; l’environnement institutionnel (les lois, la politique, l’économie ; règles de vie en communauté, etc) et l’environnement physique (le logement de la personne : appartement, maison, château, la rue ; les ressources financières). L’environnement offre des possibilités occupationnelles aux individus. 

À cet effet, les occupations sont conceptualisées comme faisant le pont entre l’environnement et l’individu, puisque celui-ci agit sur son environnement par le biais de ses occupations. Ce modèle propose trois finalités occupationnelles, soit les soins personnels (manger, boire, se déplacer, faire son épicerie et son ménage), la productivité (le travail, les études et le bénévolat) et les loisirs (randonner, lire, dessiner).

Le rendement occupationnel est défini comme le « résultat d’un rapport dynamique qui s’établit tout au long de la vie entre la personne, l’environnement et l’occupation. Le rendement occupationnel évoque la capacité d’une personne de choisir, d’organiser et de s’adonner à des occupations signifiantes qui lui procurent de la satisfaction. » Puis, l’engagement occupationnel, « capture la plus large des perspectives de l’occupation ».  Ce terme réfère à tout ce qu’une personne fait pour s’impliquer, s’investir, pour participer et pour s’occuper. Ainsi, l’engagement occupationnel est plus que la simple réalisation d’une occupation.

Le modèle canadien du rendement et de l’engagement occupationnel (MCREO)     

Avantages de l’utilisation du modèle en santé mentale

L’utilisation du MCREO est cliniquement efficace pour détecter les changements significatifs des vies des personnes qui présentent des problématiques de santé mentale. En effet, l’utilisation du modèle en santé mentale permet de prendre en compte la subjectivité, la spiritualité de la personne ainsi que l’aspect social.

En santé mentale le MCREO, nous permet de regarder la personne au-delà de son diagnostic (bipolaire, schizophrène, etc.). Nous allons explorer et prendre en considération la personne dans sa globalité avec ses valeurs (ce en quoi elle croit) et ses forces. 

Références : 

Christiansen, C., Baum, C. M., & Bass-Haugen, J. (2005). Occupational therapy: performance, participation, and well-being. Thorofare: Slack.

Dunn, W. (2011b). Using frames of reference and practice models to guide practice. Dans Best practice occupational therapy for children and families in community settings. Danvers: Slack inc.

Morel-Bracq, M-C. (2017). Les modèles conceptuels en ergothérapie. Introduction aux concepts fondamentaux (2ème édition). De Boeck Supérieur : Lausanne, Suisse.

Ordre des ergothérapeutes du Québec (OEQ). Qu’est-ce que l’ergothérapie? Repéré à https://www.oeq.org/m-informer/qu-est-ce-que-l-ergotherapie.html 

Sames, K. M. (2010). Documenting  Occupational Therapy Practice. Upper Saddle  River: Pearson Education, 36-46 

Townsend, E.A., & Polatajko, H.J. (2013). Habiliter à l’occupation: Faire avancer la perspective ergothérapique de la santé, du bien-être et de la justice par l’occupation (2e ed. version française Noémi Cantin). Ottawa, Ont : CAOT Publications ACE.