Je suis un homme, je n’ai pas besoin d’aide

Je me suis longtemps répété cette phrase lorsque j’allais moins bien dans ma vie, et je ne suis certainement pas le seul. Bien que je travaille dans la relation d’aide, j’ai encore cette barrière en moi m’empêchant de m’exprimer lorsque j’ai besoin des autres. Mais pourquoi c’est difficile pour un homme d’avouer son mal-être même à ses proches ?
Comme vous le savez peut-être, l’ALPABEM offre 10 conférences par année ayant comme sujet les différents enjeux touchant à la santé mentale. Pour commencer la saison, nous avons reçu l’animateur de radio et chroniqueur de télévision MC Gilles, de son vrai nom Dave-Éric Ouellet, pour parler de la demande d’aide chez les hommes. Durant la conférence, il a mentionné qu’il y a plusieurs années, il a été hospitalisé car il “avait touché le fond” et ne voyait plus la lumière. Sans entrer trop dans les détails, il disait qu’il ne voyait plus d’espoir, qu’il était persuadé que personne ne pouvait l’aider et qu’il était faible de ne pas pouvoir s’en sortir seul.
Son témoignage m’a beaucoup fait réfléchir sur moi-même et sur pourquoi j’ai un blocage quand je vais moins bien. C’est quand même hypocrite de ma part : je travaille dans un organisme en santé mentale, j’encourage l’autre à s’ouvrir quand le bobo est trop douloureux, à venir chercher l’aide des professionnels ou de leurs proches, mais moi-même je m’empêche de me montrer vulnérable devant les autres.

Ce n’est pas nouveau que la société voit l’homme comme étant stoïque, en contrôle, fort, invincible, etc. Lorsque vous pensez à un “vrai” homme, qui avez-vous en tête ? Pour ma part, je pense à Clint Eastwood et James Bond. Ces modèles, provenant souvent de notre enfance, ont depuis longtemps influencé l’image de la masculinité et inconsciemment, nous l’avons internalisé. Dans les situations difficiles, nous avons appris à serrer les dents et à continuer d’aller de l’avant, coûte que coûte. Lorsqu’elles deviennent trop envahissantes, la consommation de substances, comme l’alcool ou les drogues, devient souvent la solution. Mal adapté, mais une solution quand même.
La santé mentale est un sujet très tabou pour l’homme. La peur d’être perçu comme faible parce qu’on souffre de dépression, par exemple, fait en sorte que les hommes vont beaucoup moins consulter, ou vont attendre au dernier moment pour le faire. Avouer que l’on pourrait avoir besoin d’aide vient attaquer l’ego que nous avons construit de nous-même. Initialement conçu pour nous protéger, notre égo vient ici mettre des bâtons dans les roues.

Ce n’est pas pour rien que le taux de suicide au Québec est 3 fois plus élevé chez les hommes que chez les femmes : quand ça va mal, les hommes se renferment, attendent d’être au bout du rouleau et la seule solution qu’ils voient est d’en finir avec tout.

Je vous pose la question : c’est quoi être fort ? Dans les années 1700, c’était d’être capable de bûcher du bois pour survivre à l’hiver en même temps que d’être capable de chasser le souper et de défendre le pays contre les Anglais. L’homme avait le rôle de pourvoyeur et de protecteur de sa famille, ne laissant pratiquement aucune place à l’émotivité. Bien que notre réalité ait fortement changé depuis, le fond reste le même : un homme, ça fait ce qu’il faut pour surmonter les obstacles et ne fuit pas devant l’adversité.
Avec ce qu’on vient de nommer, est-ce qu’être fort veut dire fuir nos émotions et enterrer notre mal-être ? Ou ça serait plutôt d’attaquer nos problèmes en pleine face et de prendre les vrais moyens pour les régler ? Lorsque vous déménagez, personne ne vous perçoit comme faible si vous dites “Viens m’aider, on va monter le frigo”. C’est le même principe lorsque vous dites à un ami ou un intervenant que ça va moins bien. Personne ne vous dira “ Ben là, t’es capable de t’en sortir seul, y’a rien là !” ou bien “ Hey tu commences à être lourd avec tes problèmes, je préfère que tu arrêtes de m’en parler.”

Même qu’à l’inverse, en demandant à un autre homme que vous avez besoin de parler, l’autre va se sentir important et prendra son rôle masculin de protecteur et de sauveur. Quoi de plus valorisant que de se faire dire “J’ai besoin de toi” ? Chacun est gagnant dans l’affaire : vous vous sentez mieux de vous être confié, et l’autre se sentira important. Votre relation sera plus forte et qui sait, peut-être que l’autre sera encouragé à s’ouvrir à vous aussi.

Je vais quand même vous l’accorder, ce n’est pas facile de s’exprimer quand nous ne sommes pas habitués. Oui ça fait peur, oui on ne sait pas trop comment faire, mais croyez-moi que l’effort en vaut la peine. Au bout du compte, c’est peut-être votre vie que vous sauvez en vous confiant à quelqu’un d’autre.

Le défi de connaître nos émotions

Dans la relation d’aide, il est fréquent qu’on vous demande “comment vous sentez-vous ?”. Pour la plupart, cette question est simple : “Je me sens gêné, inquiet, blessé, optimiste, embêté, etc.” Pour environ 10% de la population, cette simple question peut être pratiquement impossible à répondre. Le concept de l’alexithymie est relativement nouveau. Il a été introduit en 1970 et depuis quelques décennies, de plus en plus de travaux portent sur ce trouble. Une personne avec ce trouble serait comme aveugle par rapport à ses propres émotions et aurait donc une grande difficulté à comprendre son état émotionnel et à le communiquer aux autres. Nous allons voir d’où cela peut provenir, les effets dans le quotidien et comment s’en rétablir.

Je ne ressens rien

L’alexithymie est un trouble de la lecture et de l’expression des émotions. Il est composé de deux grandes dimensions : affective, qui est la difficulté à ressentir les émotions, et cognitive, qui est la difficulté à communiquer nos émotions aux autres. Au lieu des émotions, semblable à un trouble psychosomatique, la personne ressent plutôt des douleurs physiques, comme des ulcères d’estomac, des troubles gastro-intestinaux, des troubles cardiocirculatoires, etc. Cela devient leur mode d’expression principal, remplaçant ainsi les sentiments et les émotions. La personne sera capable de dire qu’elle va bien ou mal, mais sera totalement incapable de donner plus de détails ou d’apporter une plus grande nuance à son discours.

L’alexithymie peut apparaître de deux façons : biologique (primaire) ou psychologique (secondaire). Lorsque l’alexithymie est d’ordre primaire, cela peut être causé par un déficit dans les connexions du cerveau, plus précisément entre le système limbique, qui s’occupe de la mémoire et des émotions, et le néocortex, qui s’occupe de la pensée abstraite. On voit très souvent ce type chez les personnes avec un trouble du spectre de l’autisme, qui ont eu des lésions au cerveau, ou qui est né avec une anomalie génétique.

L’alexithymie d’ordre psychologique, où secondaire, peut se développer à la suite d’un changement majeur dans la vie de la personne. Des liens ont été établis entre l’alexithymie et plusieurs troubles, notamment :

• La toxicomanie
• L’anxiété
• La dépression
• Le trouble de stress post-traumatique
• Les troubles de l’alimentation
• Les troubles de la personnalité
• Et plus encore…

Selon notre compréhension actuelle, l’alexithymie pourrait être un mécanisme de défense, bien qu’inadapté. En se “déconnectant” de ses émotions, la personne évite ainsi de trop souffrir.
Cela peut aussi se développer selon notre éducation. Dans les familles où il est mal vu d’exprimer des émotions comme la peur, la honte ou la tristesse, l’enfant comprend que ces émotions doivent être toujours cachées et ne développe pas le vocabulaire nécessaire pour bien s’exprimer. La plupart du temps, la personne adulte sera seulement capable de manifester de la colère, étant la seule émotion acceptable d’exprimer.

Comment ça m’affecte

En général, comment peut-on se faire des relations significatives ? En ayant des intérêts communs, en partageant nos émotions et en ayant des expériences marquantes avec les autres. Maintenant, dites-vous que vous êtes incapables de comprendre vos émotions ou de les communiquer. Cela devient un énorme défi de réussir à créer et entretenir des relations solides. Le sentiment d’isolement que cela entraîne peut fragiliser la santé mentale de la personne. Elle se sentira incomprise des autres, incapable de dire ou de comprendre ce qui se passe en elle.
Des problèmes de motivation peuvent aussi apparaître. La personne affectée n’a pas le désir intérieur d’améliorer sa situation car son raisonnement sera purement rationnel. Par exemple, dans un emploi, l’alexithymique pourrait être malheureux car il n’est pas épanoui, mais il ne sera pas porté à chercher un nouvel emploi car il est très difficile de savoir ce qui pourrait convenir. Ne sachant pas quels facteurs lui procure du plaisir ou non, elle sera toujours dans une quête identitaire. Ses goûts ne sont pas très définis et ses loisirs ne semblent pas procurer la même joie que les autres expriment.

Comment aller mieux

Heureusement, l’alexithymie n’est pas un trouble incurable. La thérapie comportementale dialectique est un type de thérapie pour aider la personne à se recentrer sur elle-même et d’acquérir le vocabulaire nécessaire pour exprimer ses émotions. Elle se base sur la thérapie cognitivo-comportementale et focalise sur le développement de stratégies dialectique, d’acceptation et d’exercices de pleine conscience. Dans le cas où l’alexithymie est apparue à la suite d’un traumatisme durant l’enfance, un thérapeute peut aider à créer un espace sécuritaire où le patient peut se permettre d’exprimer ce qu’il refoule depuis toujours.
Même au CAFGRAF nous pouvons vous aider ! Vous pouvez voir Dolores qui pourrait vous soutenir à développer des stratégies d’expressions saines des émotions au travers de ses activités d’art-thérapie.

Références
Jouanne, C. (2006). L’alexithymie : entre déficit émotionnel et processus adaptatif. Psychotropes, 12, 193-209. https://doi.org/10.3917/psyt.123.0193
Gosselin, E., Bélanger, J. & Campbell, M. (2020). CONTRIBUTION DU STRESS ET DE l’ALEXITHYMIE AU BONHEUR DES ENSEIGNANTS. Revue québécoise de psychologie, 41(3), 157–178. https://doi.org/10.7202/1075469ar
https://fr.wikipedia.org/wiki/Alexithymie

Démystifions la communication

La communication sexuelle, c’est la communication des pensées, des désirs, des préférences et des problèmes au niveau sexuel ou relationnel (Gillespie, 2017). Celle-ci permet par exemple de s’adapter aux autres ou de négocier de façon saine face à différentes situations (Amato et al., 2014). Elle permet aussi d’explorer la sexualité, de vivre de nouvelles expériences et d’avoir une vie sexuelle plus excitante, épanouissante et satisfaisante ce qui est associé à une vision davantage positive de la vie ainsi qu’à une meilleure santé mentale et physique (Gillespie, 2017). La sexualité étant autrefois un sujet très tabou, ce n’est pas tout le monde qui a eu accès à des représentations saines de la sexualité ou à une éducation sexuelle complète.



Les personnes ayant de la difficulté à reconnaitre les émotions d’autrui auraient des relations sociales de moindre qualité ainsi qu’une difficulté à maintenir ces relations (Nelis, 2014) ce qui est associé à l’anxiété et la dépression ainsi qu’à une adaptation de moins bonne qualité (Nelis, 2014). De plus, pour certaines personnes, l’intimité se retrouve à travers la communication et le manque de celle-ci peut mener à du ressentiment, des problèmes relationnels (ex. : sentiment d’incompatibilité) et/ou des difficultés au niveau de l’estime de soi (Gillespie, 2017).



La santé mentale est nécessaire pour affronter les facteurs de stress et pour gérer le bien-être émotionnel et physique. Les personnes rencontrant des difficultés de communication se retrouvent désavantagées dans l’accès aux soins qui leur permettrait de se protéger face à certains facteurs de risque tel que l’isolement (Watson et al., 2021). Aussi, plusieurs personnes ayant des enjeux de santé mentale feraient face à davantage de risque d’abus et à une autodétermination réduite (Watson et al., 2021). L’autodétermination concerne la motivation des humains à faire des choix, avoir des buts et résoudre des problèmes. C’est d’avoir le pouvoir de décider pour soi-même. Grosso modo, la communication sexuelle est un élément important du bien-être sexuel tout au long de la vie entraînant des conséquences sur la santé mentale et les relations sociales.

 

 

Références :

Amato, É., Pailler, F. & Schafer, V. (2014). Sexualités et communication. Hermès, La Revue, 69, 13-18. https://doi.org/10.3917/herm.069.0013

Watson, Raghavendra & Crocker (2021). Mental health matters: a pilot study exploring the experiences and perspectives of individuals with complex communication needs, Augmentative and Alternative Communication, 37:2, 102-112, DOI: 10.1080/07434618.2021.1921845

Gillespie, B. J. (2017). Sexual synchronicity and communication among partnered older adults. Journal of Sex & Marital Therapy, 43(5), 441-455.

Nélis, D. (2014). Chapitre 4. L’identification des émotions d’autrui. Dans : Moïra Mikolajczak éd., Les compétences émotionnelles (pp. 59-88). Paris: Dunod. https://doi.org/10.3917/dunod.mikol.2014.01.0059

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L’hypervigilance : se méfier du bonheur

Bonjour à toutes et à tous, bienvenue dans l’été! Ça fait plusieurs mois que vous ouvrez les rideaux le matin en vous demandant « Est-ce que l’hiver est enfin terminé ?!? ». Si c’est votre réalité, alors vous souffrez peut-être d’un cas d’hypervigilance de l’arrivée de l’été!

Un peu de sérieux maintenant. Qu’est-ce que l’hypervigilance? Même si la définition du mot est assez simple à comprendre, prenons le temps de décortiquer tout ça. Dans cet article, nous commencerons par définir l’hypervigilance. Ensuite, nous parlerons des symptômes, de la manière dont l’hypervigilance se développe et des moyens pour se rétablir.

Pour débuter, on pourrait définir l’hypervigilance comme un état d’alerte constant qui touche plusieurs aspects de notre vie : comportemental (ce qu’on fait), cognitif (ce qu’on pense) et physiologique (dans notre corps). L’hypervigilance n’est pas une maladie ou un trouble, c’est un symptôme de l’anxiété. On pourrait donc dire que l’hypervigilance, c’est d’être toujours en état d’alerte ou de méfiance.

Répondons maintenant à la question suivante : comment devient-on hypervigilant?

Indice : ce n’est pas une question de choix! La plupart des gens hypervigilants le sont devenus à cause d’événements difficiles. On parle de gens ayant survécu aux abus ou qui ont été témoins de grandes violences. Tous ces événements envoient des messages qui demeurent gravés dans notre amygdale : la vie est dangereuse et il faut toujours se méfier.

Voici des exemples qui vous permettront de reconnaitre un état d’hypervigilance chez vous ou chez les autres.

Comportemental 

À quoi ressemblent les comportements d’un individu hypervigilant?

C’est quand vous chassez vos amis de votre entourage. Pourquoi? Parce-que vous avez l’impression qu’ils vous trahiront et qu’ils profiteront de vous. C’est aussi parce que vous aimez mieux l’isolement que le risque de faire confiance et d’être trahi. C’est grave, tout ça. Si vous finissez par vous ramasser seul parce que vous vous méfiez trop, vous créez plus de problèmes que vous n’en réglez.

Cognitif

Nous sommes ici dans le domaine des pensées. Quand on est hypervigilant, de quelle manière pense-t-on? Voici des exemples.

Quand vous êtes dans un groupe, vous restez sur vos gardes. Parce que vous pensez que le monde est peuplé de gens mal intentionnés. Quand vous vous préparez à sortir, vous vous inquiétez des accidents possibles. Parce qu’on ne peut jamais prédire quand ça va mal se passer. Quand vous êtes en couple, si votre conjoint n’arrive pas à l’heure, vous avez milles inquiétudes. M’a-t-il trahi? Est-elle avec quelqu’un d’autre? Bref, quand on est hypervigilant, il n’en faut pas beaucoup pour s’inquiéter.

Physiologique

La physiologie, c’est la science du fonctionnement du corps. Le cerveau des gens souffrant d’hypervigilance n’est pas « connecté » de la même façon que le cerveau des gens détendus. Plus précisément, nous parlons d’une toute petite structure du cerveau : l’amygdale. Attention! Nous ne parlons pas de ce qui se cache dans le fond de votre gorge, mais d’une partie du cerveau en forme d’amande (en latin, amygdale signifie « amande »). C’est une partie du cerveau qui appartient au système limbique (ou cerveau émotionnel). C’est une partie très importante de notre corps : elle est à la base du contrôle des émotions. Elle produit les hormones qui augmentent votre stress. L’amygdale est aussi impliquée dans les comportements de réponse au stress. Vous figez lorsqu’on crie après vous? C’est votre amygdale qui est responsable de cette réaction.

Avant de parler de guérison, laissez-moi vous parler rapidement des autres impacts que peut créer une amygdale « déréglée ». Les gens qui ont des pensées dépressives, surtout les adolescents, vont être hypervigilants face à ces pensées. Résultat : les jeunes pensent seulement à ce qui ne va pas et mettent de côté les belles expériences. L’hypervigilance augmente donc le sentiment de dépression, puis même le taux de suicide, car le cerveau réserve toute sa place au négatif.

En bref, l’hypervigilance, c’est d’avoir son système d’alarme réglé au plus sensible. Tellement sensible qu’il sonne même quand il n’y a rien de grave. Votre amoureuse n’est pas arrivée après 5 minutes? Le système d’alarme est parti et on se met en mode inquiétude.

Comment on guérit ça?

Il y a plusieurs méthodes reconnues qui permettent de rétablir la santé de votre amygdale. Pour vous, cela signifie moins de stress inutile et d’impressions de danger. Voici un premier moyen : la méditation. Vous trouvez que c’est un moyen un peu doux pour contrer les effets d’un traumatisme? Détrompez-vous! Des scans du cerveau permettent de confirmer que l’amygdale des gens qui méditent se porte mieux. Ça fonctionne autant pour les traumas d’enfance que les traumas vécus dans l’armée.

D’autres méthodes? Certainement! Vous pouvez aussi entreprendre un suivi individuel afin d’aborder les croyances qui vous rendent plus méfiants. Plusieurs interventions ont fait leur preuve dans le domaine du rétablissement, il ne faut pas vous en priver! Finalement, n’oubliez pas qu’une bonne hygiène de vie aura toujours un effet bénéfique pour vous. En résumé, n’abusez pas de la caféine si vous recherchez la détente!

Nous pourrions donc dire que la première étape pour vous rétablir de vos symptômes anxieux, c’est d’en être conscient. Parfois, on pense que l’autre est dangereux. Mais est-ce que ce ne serait pas notre système d’alarme qui serait trop sensible?

 

 

 

Références :

Smitha Bhandari. 2024. What Is Hypervigilance?. https://www.webmd.com/mental-health/what-is-hypervigilance

Alvin Powell, 2018, When science meets mindfulness. Harvard Gazette. https://news.harvard.edu/gazette/story/2018/04/harvard-researchers-study-how-mindfulness-may-change-the-brain-in-depressed-patients/

« Hypervigilance », 2003. https://www.sciencedirect.com/topics/medicine-and-dentistry/hypervigilance#definition

Know your brain: amygdala. https://neuroscientificallychallenged.com/posts/know-your-brain-amygdala

Communication digitale et effritement des frontières interpersonnelles

 Fondamentalement, l’humain recherche la connexion avec les autres. Nos façons de communiquer ont largement évolué, passant des lettres postales, aux textos et aux différentes plateformes de communication. La rapidité et le volume de messages que nous recevons dans l’ère numérique sont sans précédent. Ça soulève la question : sommes-nous adaptés pour conjuguer avec ces interactions continuelles, rapides, et abondantes ? Explorons ensemble l’impact de l’évolution de la communication numérique sur l’éclatement des frontières interpersonnelles.

Boom des messages avec le boom technologique

L’évolution de nos interactions sociales est fascinante. Il y a quelques décennies, des périodes claires d’inaccessibilité se définissaient lorsque nous étions à l’extérieur de la maison : à l’épicerie ou en voyage ? nous n’étions pas rejoignables. Ces coupures étaient clairement délimitées dans le temps, offrant une période de répit. Aujourd’hui, ces frontières n’existent plus naturellement : nous devons consciemment les instaurer(ex : mettre notre téléphone en mode ne pas dérangé).

L’introduction des téléphones cellulaires a initié une nouvelle ère dans nos communications. On se rappellera, dans les années 2000, rédiger un texto prenait du temps avec les claviers à touches numériques (pour écrire « allô », il fallait appuyer 13 fois sur des touches). Il fallait être motivé à écrire un message en utilisant les boutons chiffrés de nos téléphones. Par la suite, les changements dans la communication ont été exponentiels.

En 2000, une personne envoyait/recevait en moyenne 35 textos par mois. En 2011, ce chiffre atteignait près de 40 textos par jour, et chez les jeunes adultes, 50 textos par jour.[1] Aujourd’hui, ces chiffres explosent avec la venue des applications intégrant la communication comme Messenger, Twitter, Instagram, Snapchat, Discord, Teams, Whatsapp, Reddit, etc. Ceci contribue à l’explosion du volume de messages que nous recevons. Pour vous donner une idée de grandeur, quotidiennement, 23 milliards textos, 50 milliards messages WhatsApp, 50 milliards messages Facebook, 5 milliards de Snapchat sont envoyés/reçus.[2] Ça en fait des messages reçus!

Effritement des frontières par la culture de l’instantanée

Les téléphones intelligents permettant de communiquer à tout moment, de n’importe où avec n’importe qui à travers le monde. Par conséquent, nous sommes accessibles en permanence, disponibles à toute heure du jour et de la nuit. Cette disponibilité instantanée crée une attente implicite que chacun est toujours prêt à lire et à répondre aux messages instantanément, similaire à une conversation en face-à-face. Et ce, peu importe l’urgence du message.

Les notifications de lecture sur certaines plateformes ajoutent une pression supplémentaire pour une réponse immédiate dès que le message est vu. De plus, le statut « en ligne » qu’affichent certaines applications, informe les autres de notre disponibilité, intensifiant ainsi cette attente de réponse rapide.

D’ailleurs, il n’est pas rare de jongler entre plusieurs conversations simultanées sur différentes applications avec une même personne, créant parfois un sentiment d’être coincé à devoir répondre à tous les messages de cette personne en même temps.

Ne pas répondre immédiatement aux messages que nous recevons peut amener un sentiment d’avoir pris du retard et un sentiment de ne pas avoir respecté les « règles » de la communication. Ce sentiment de culpabilité peut plonger l’autre dans la justification de son message « tardif ».

Left on read : questionnements et anxiété à deux sens

L’absence d’une réponse rapide peut susciter de l’anxiété chez l’émetteur du message, qui s’interroge sur la réception de son message et sur l’interprétation qu’en fait le destinataire. D’un côté, pour l’émetteur du message, ne pas recevoir de réponse rapidement ou être lu sans réponse peut engendrer de l’anxiété et une spirale de questionnements: « est-ce que mon message a mal été interprété?»; « Je pense que je n’aurais pas dû mettre un point à la fin de mon message… » (oui, la science montre que les textos avec un point sont perçus comme moins sincères[3] et abrupt[4]), « Peut-être que j’aurais dû utiliser un emoji pour clarifier mon ton ? »; « Peut-être qu’il ne m’apprécie pas? » …

De l’autre côté, le receveur du message peut craindre que répondre des heures après l’envoi du message soit mal perçu, et encore plus s’il le lit sans y répondre, donnant l’impression de ne pas accorder suffisamment d’importance à la conversation. En fait, un message répondu quelques heures après son envoie est perçu comme moins enthousiaste[5] et est perçu comme un manque d’attention à la conversion[6]. De plus, le receveur peut craindre que de répondre au message reçu ouvre la porte à une conversation plus intensive, de laquelle il n’est pas disposé à avoir.

Épuisement numérique : attentes irréalistes de l’instantanéité

La gestion des multiples notifications/messages peut devenir écrasante, entraînant un sentiment d’être dépassé, et de culpabilité lorsque les réponses ne sont pas immédiates. Certains peuvent choisir d’éviter de regarder leurs messages, puisque ça génère des sentiments négatifs. Ainsi, les messages qui s’accumulent nécessitent encore plus d’efforts pour les lire et y répondre. Répondre à toutes les conversations devient alors une tâche, souvent accompagnée d’un poids émotionnel et d’une auto-critique pour avoir pris trop de temps à répondre (ex : je ne suis pas un bon ami pour avoir pris autant de temps à répondre…).

L’émergence de la communication numérique a nourri des attentes irréalistes en matière de disponibilité et de réactivité. La rapidité avec laquelle nous sommes désormais capables de communiquer à créer un nouveau paradigme où les délais de réponse se mesurent souvent en minutes.

Ces attentes insoutenables contribuent à l’épuisement numérique, où répondre à toutes les notifications engendre du stress. Le stress résultant de cette constante sollicitation peut nuire à notre bien-être mental et à la qualité de nos interactions, car elle réduit souvent la communication à une série de réponses rapides et superficielles (ex : on like le message plutôt que d’y répondre, on envoie un gif, etc., …) plutôt qu’à des échanges réfléchis et significatifs.

Conclusion

Les téléphones intelligents ont révolutionné la manière dont nous communiquons, rendant notre disponibilité continuelle et ininterrompue, et le large afflux des échanges naturels. Il est bien de prendre un pas de recul et de prendre conscience de l’effritement des frontières interpersonnelles qui peut venir avec la communication moderne. La communication numérique nécessite une gestion consciente pour éviter l’épuisement digitale et maintenir des interactions numériques saines et équilibrées.

 

 

 

Références :

[1] https://www.pewresearch.org/internet/2011/09/19/how-americans-use-text-messaging/

[2] https://www.sellcell.com/blog/how-many-text-messages-are-sent-a-day-2023-statistics/

[3] Gunraj, D. N., Drumm-Hewitt, A. M., Dashow, E. M., Upadhyay, S. S. N., & Klin, C. M. (2016). Texting insincerely: The role of the period in text messaging. Computers in Human Behavior, 55, 1067-1075. https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S0747563215302181

[4] Houghton, K. J., Upadhyay, S. S. N., & Klin, C. M. (2018). Punctuation in text messages may convey abruptness. Period. Computers in Human Behavior, 80, 112-121. https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S0747563217306192

[5] Phillips, N. (2023). Exploring the use of time delay as a pragmatic cue in text messaging. https://commons.lib.jmu.edu/masters202029/248/

[6] Lee, H. P. H., Chiang, Y. S., Chou, Y. L., Lin, K. P., & Chang, Y. J. (2023). What makes IM users (un) responsive: An empirical investigation for understanding IM responsiveness. International Journal of Human-Computer Studies, 172, 102983.