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octobre, 2025

S’aimer, même quand c’est difficile

Rédigé par : 

Ali Tarraf

Il y a des jours où rien ne va, et pourtant, on continue comme si de rien n’était. Non pas parce que tout va bien, mais parce que montrer ses failles semble devenir un luxe. Dans un monde où
tout s’affiche, on apprend vite à masquer ce qui dérange, comme la fatigue, les doutes ou la douleur. On garde le sourire, même quand tout vacille. Cependant, le mal-être, lui, reste bien enfoui. Et parfois, on en vient à oublier qu’il est normal de traverser des tempêtes.

Ce qui n’aide pas, c’est cette voix intérieure qui se fait entendre dès que ça va mal. Celle qui juge, critique et enfonce. Elle pointe chaque faux pas, valide chaque insécurité, et transforme nos moments difficiles en luttes contre soi-même.

Et si on changeait de ton ? Si, au lieu de se rabaisser, on choisissait de se soutenir ? C’est là qu’entre en jeu une pratique qui peut faire toute la différence : l’autocompassion.

L’auto-quoi ?

Selon Kristin Neff (2003), l’autocompassion, c’est la capacité de se traiter avec bienveillance dans les moments de difficulté, d’échec ou de souffrance, plutôt que de se juger négativement ou de s’isoler.

Autrement dit, il s’agit d’une autre manière de réagir face à la douleur, non pas en se battant contre soi, mais en s’accueillant tel qu’on est. Neff ajoute que c’est aussi offrir à soi la même chaleur qu’on donnerait sans hésiter à un ami qui souffre. En effet, cette présence réconfortante qu’on aurait pour un ami, on peut l’avoir pour nous aussi.

Ce que dit la science

Et ce n’est pas juste du blabla bien-être. Les recherches sont claires : L’autocompassion aide à apaiser la colère, les symptômes d’anxiété et de dépression, ainsi qu’à retrouver une vraie qualité de vie. De plus, elle favorise la maîtrise de soi, la motivation à continuer malgré les obstacles et la capacité d’apprendre de ses échecs.

L’autocompassion a aussi des effets concrets sur notre façon d’être au monde. Par exemple, Reyes (2012) parle de trois bénéfices majeurs : une plus grande autonomie, une meilleure capacité à prendre soin de soi, et un lien plus fort avec les autres. L’autonomie vient du fait qu’on gère mieux nos émotions grâce à la pleine conscience et à la bienveillance envers soi-même. Aussi, plus on se traite avec compassion, plus on est capable d’en offrir aux autres. Ainsi, on se sent plus connecté, plus en lien, plus humain.

Pourquoi est-ce si dur de s’y mettre ?

Si tu as du mal à être bienveillant avec toi, tu n’es pas le seul. Il y a plein de raisons à ça.

Certaines personnes grandissent dans des environnements où les messages critiques sont fréquents. Par exemple, dans ma jeunesse, il m’est parfois arrivé d’entendre : « Tu ne feras jamais rien de ta vie si tu continues comme ça. »

Même si ces paroles peuvent être motivées par l’intention d’encourager à réussir, elles laissent souvent des traces durables. Avec le temps, ces voix extérieures peuvent devenir des pensées internes.

Des normes bien ancrées dans notre société peuvent renforcer ce sentiment aussi. Depuis qu’on est petits, on nous apprend à mériter notre valeur. À l’école, dans les groupes d’amis, sur les réseaux… il faut briller, performer, être validé. Il n’est donc pas étonnant qu’on devienne ultra sévères avec nous-mêmes.

Il est aussi fréquent de penser que l’autocritique est un moteur de progrès, comme si se juger sévèrement pouvait encourager à faire mieux. En réalité, cela tend plutôt à diminuer la motivation et l’énergie mentale. À force de se critiquer intérieurement, on s’épuise avant même d’avoir agi.

L’autocompassion, en revanche, invite à reconnaître une humanité partagée, selon laquelle les difficultés vécues ne sont pas isolées, d’autres les traversent aussi. Prendre conscience de ça peut déjà alléger le poids que l’on porte.

Comment s’y mettre ?

Une façon simple de commencer à pratiquer l’autocompassion, c’est d’écrire un message ou une lettre à toi-même, comme si tu parlais à un(e) ami(e) très cher(e) qui traverse une période difficile. Sauf que cette personne, c’est toi.

Tu peux commencer par quelques mots tout simples :Cher moi, je sais que ce n’est pas facile en ce moment. Je vois combien tu fais de ton mieux. Et même si ça ne marche pas toujours comme
tu veux, tu mérites de la douceur.

Laisse venir ce qui a besoin d’être dit. Tu peux inclure :
– De la reconnaissance : « Tu fais de ton mieux, même si ça ne se voit pas. »
– De la validation : « Ce que tu ressens est légitime. »
– Du réconfort : « Tu n’es pas seul. Beaucoup passent par là. »
– De la tendresse : « Tu n’as pas besoin d’être parfait pour mériter de l’amour. »

Pas besoin que ce soit long ou parfaitement écrit, juste sincère. Le simple fait de tourner ta bienveillance vers toi-même peut transformer ta façon de traverser les moments difficiles.

Tu peux relire cette lettre chaque fois que la petite voix critique prend trop de place.

Conclusion

Bref, s’auto-critiquer ne rend pas plus fort. Se traiter avec respect et douceur, oui. L’autocompassion, c’est une force que l’on peut tous puiser. Commence simplement : une parole gentille, une respiration, une pause. Parle-toi comme tu parlerais à ton meilleur ami.

Tu verras, ces petits pas changent tout.

Références :

NEFF, K. D. (2003). The Development and Validation of a Scale to Measure Self-Compassion. Self and Identity, 2(3), 223–250.
https://doi.org/10.1080/15298860309027

Reyes, D. (2012). Self-compassion: A concept analysis. Journal of holistic nursing, 30(2), 81-89. doi:10.1177/0898010111423421
https://www.la-clinique-e-sante.com/blog/confiance-estime/pratiquer- auto-compassion-bienfaits

https://www.esantementale.ca/Yukon/Lauto-compassion-plusimportante-que-lestime-de-soi-et-peut-tre-la-cle-de-la-santementale/
index.php?m=article&ID=52807

https://www.grepsy.psy.ulaval.ca/publications/lautocompassion-
un-outil-accessible-et-efficace-pour-les-etudiants-universitaires

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