Le cadre du continuum des thérapies expressives en art-thérapie

Le cadre du Continuum des Thérapies Expressives (CTE) en art-thérapie c’est quoi ? En art-thérapie, on utilise des médias d’art-visuels. En utilisant le cadre du CTE, les médias sont disposés sur un continuum dans le studio d’art-thérapie. C’est-à-dire qu’on dispose les médias des plus fluides aux plus résistifs. Ça veut dire quoi tout ça ? Il n’y a rien de mieux qu’une image. 

Mais encore, pourquoi du plus fluide au plus résistant ? Chaque médium peut amener dans le corps une réaction différente. Cela peut aller de l’indifférence, au plaisir, au dégoût ou encore une résistance sans raison particulière. Par exemple, la création avec l’aquarelle peut amener une émotion de lâcher-prise ou de déplaisir. Certaines personnes seront ravies de jouer avec la fluidité de l’aquarelle qui peut s’écouler dans différents sens. D’autres se sentiront désemparées, car l’aquarelle et les médiums apparentés laissent moins de place au contrôle. Un autre exemple est la création avec l’argile. Certaines personnes peuvent avoir de la difficulté à la manipuler. D’autres auront de la difficulté à apprécier sa matérialité. Plusieurs personnes seront surprises d’arriver à donner forme à ce qu’ils imaginent. Certaines personnes aimeront la malléabilité de l’argile et sa propriété pourtant solide.

Des médiums comme les crayons de couleurs, le collage ou les feutres peuvent faciliter le développement de capacités cognitives. Les thérapies expressives comprennent beaucoup plus de matériaux que ceux illustrés ci-haut. Cependant, il est important de ne pas introduire trop de médiums inconnus au début d’une série de séances en art-thérapie.1

Un aspect important de l’approche par le CTE est d’encourager la personne à explorer les médiums. Une des valeurs importantes est de créer avec ce qui est présent.  Comment la personne se sent, quelles couleurs et textures y correspondent. Avec le temps on peut introduire des matériaux moins conventionnels. Ces matériaux peuvent favoriser une expression symbolique et significative pour la personne. Les matériaux non conventionnels peuvent être du tissu, des souliers, pour confectionner un personnage ou une marionnette. Ces explorations symboliques peuvent aider à nourrir des aspects de soi avec un manque à combler. L’important est d’avoir une variété de matériaux qui peuvent nourrir les différents besoins liés à la culture. Par exemple, l’utilisation de tissus, laine ou rubans apaisent et nourrissent les besoins de type sensoriels.

On peut aussi marcher dans l’environnement immédiat pour trouver des objets qui peuvent nourrir le processus créatif. Ce processus de recherche de l’objet naturel ou autre favorise l’action. Par exemple, je marche dans le parc et je trouve une plaquette informatique de 4 pouces (oui ça m’est arrivé). Intéressant.  Comment est-elle arrivée là ? D’où vient-elle ? Qui a participé à sa création ? Je trouve une noisette, mais il n’y a aucun noisetier dans le boisé. Étrange. Quel voyage a-t-elle fait pour se rendre dans ce boisé ? On peut alors imaginer et créer l’histoire de ce qu’on a trouvé.

Vous aurez compris que tout cela explique le CTE. On peut regarder ce continuum sous l’angle de fonctions de composantes physiques et/ou cognitives. Toutes ces composantes font partie de l’expérience humaine. Cela contribue au processus créatif de différentes manières. La personne choisit de créer en fonction de ce qu’elle a besoin d’exprimer. Si le besoin est de marteler ou frapper, elle peut le faire avec un feutre et créer à partir de points successifs. Si elle a besoin de douceur, de textures, elle pourrait utiliser des textiles, de la peinture à doigts ou du pastel à l’huile travaillé avec les doigts. Un autre pourrait avoir besoin d’exprimer des émotions et utiliserait l’aquarelle. Ou encore pour changer sa perspective sur une situation, par exemple en agrandissant une image (comme si on la regardait au microscope). Dans un même processus, la personne peut avoir besoin d’utiliser un crayon pour ajouter un élément précis (passant ainsi à la composante cognitive). L’ajout d’un élément symbolique peut amener une conclusion ou une nouvelle direction à l’œuvre en cours.

INSÉRER GRAPHIQUE DE HINZ 2008 MODIFIÉ

Tout cela pour dire que le CTE est un cadre intéressant, tant pour la personne que pour l’art-thérapeute. L’outil peut permettre à la personne de mieux comprendre ses besoins et de mettre des mots sur son processus. Si au contraire la personne ne sait pas comment procéder, le cadre du CTE peut offrir des possibilités d’exploration en lien avec ce qui est présent. Ce continuum ne se travaille pas de manière linéaire ou par étape, mais plutôt selon le besoin de la personne. Ce n’est pas non plus une recette, mais plutôt un outil ou un cadre d’accompagnement. 

Tout comme avec l’art-thérapie positive2 on travaille à partir de ce qui est présent, en validant et en cherchant avec la personne. Ce qui la motive, la soulage, lui permet de voir une situation sous différents angles, susciter l’espoir et découvrir des capacités inespérées. Bref, on sort de la boîte connue, pour sauter dans l’univers de soi qu’on connaît moins. Comme dit mon collègue Maxime, pour sortir de la boîte, faut-il encore qu’il y ait une boîte ou un cadre pour contenir tout ça.

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  1. Hinz, L. H. (2020). Expressive Therapies Continuum: A framework for using art in therapy (2nd ed.). Routledge.
  2. Wilkinson, R. A., Chilton, G. (2018). Positive Art Therapy: theory and practice. Routledge.

Le collage pour se faire du bien

Cet article portera sur le collage, un expérientiel régulièrement utilisée en art-thérapie.  Il est également moins intimidant, car la personne utilise des images qui existent dans les magazines diversifiés (Stallings, 2016). Les effets du collage qu’on pourrait observer sont:

  • Augmentation du sentiment de liberté, par exemple, par le choix des images
  • Développement de l’autonomie
  • Réduit le sentiment de dépendance envers l’intervenant.e qui accompagne
  • Augmentation de la capacité de se structurer

La pratique du collage a notamment des effets au niveau des capacités cognitives. En effet, le processus implique plusieurs opérations : sélection, découpage, assemblage et collage. Cette pratique peut avoir pour effet de restructurer les fonctions cognitives (Lusebrink et Hinz, 2022). Une entrevue avec Dominik permet de mieux comprendre ce que peut apporter une pratique active du collage.

Entrevue avec Dominik

Quel est ton premier souvenir de collage ? Je devais avoir +/- 5 ans et j’avais découpé les jouets que je voulais pour créer un collage de ma liste de souhaits. J’avais placé le collage en dessous du sapin. Il y a environ cinq ans, c’est dans un centre pour femmes que j’ai pris goût au collage.  Cette activité m’a permis de voir certaines peurs que j’avais.

Parle-moi de ton processus de collage et ce que cela t’apporte ? Cela répond à un besoin de couper. C’est déterminant, quand on coupe une image, on ne peut pas revenir en arrière. Parfois le collage se fait d’un coup, d’autres fois c’est par étapes. Par exemple, je peux passer du temps à découper une banque d’images. D’autres fois, je prépare les fonds qui vont recevoir les images choisies. C’est soit par thème ou pour exprimer quelque chose de particulier.

Quand je crée des fonds agréables à regarder, ça me sert à me remplir de la beauté des papiers et des images. Ça transforme des aspects négatifs de la vie. Aussi, la texture du papier qui supporte le collage est importante, il doit être assez épais et solide. Ça amène une sensation de concret, et ça aide que le collage reste intact avec le temps.

C’est aussi le résultat qui me motive, voir l’effet que ça peut donner. Par exemple, si je me sens fâchée, je découpe des images ou du papier à motifs. Si j’ai de la peine, je monte une histoire avec les images. Ce qui est important c’est de mettre ce que le cœur a envie de voir, pas la tête. Le cœur qui voit est différent du cœur qui ressent. Aussi, le cœur qui ressent et qui voit est dans l’action. Il voit mieux ce qui est réel.

À la fin d’une séance de collage, je me sens bien, calme, souriante et rarement déçue. Ça facilite ma capacité de choix et d’affirmation dans la vie de tous les jours. Cela apporte une forme de coupure et de changement ou encore du lâcher-prise. Aucune image n’apparaît pour rien. Les images ont toujours une signification.

Comment tes collages parlent-ils de toi ? J’ai fait plusieurs collages avec des photos de moi. Cela m’a permis de m’accepter. J’ai pu me voir, agrémenter autour des photos et ajouter ce qui faisait du sens. Tu sais, quand on est en crise on ne s’aime pas. Faire des collages avec des images de moi, m’a aidé à mieux m’aimer. Le collage a eu aussi pour effet aussi de m’aider à réapprivoiser ma famille.

Que peux-tu ajouter en ce qui concerne le collage ? C’est complètement ailleurs… Ça me procure du bien-être et de la satisfaction aussi. Puis quand un collage est commencé, c’est à l’infini. Tu peux le changer tant que tu veux : colle, décolle, recolle… Je retouche encore certains collages que j’ai faits il y a 5 ans.

Quand j’ai besoin de retravailler le passé, même si je sais que je ne peux pas le changer, je peux le rendre plus beau.  Une citation de Dominik ressort d’un de ses collages :  »cela semble toujours impossible, jusqu’à ce que ce soit fait ». En montrant ses collages, elle ajoute : quand je vois que je peux faire tout ça, c’est une forme de thérapie autonome, que j’ai faite seule. Quand j’en parle avec mon psychiatre, il me dit de continuer.

Dominik conclut qu’elle a commencé à faire des collages avec son conjoint et voit que cela amène des discussions intéressantes. On met notre jugement de côté et on se met en mode découverte. Quand on n’est pas capable de parler avec les mots, on peut parler avec les images. Tout le monde peut découper, choisir et coller. Si tu n’arrives pas à choisir dans la vie, fais du collage, tu vas apprendre à faire des choix, exprimer et t’affirmer.

Conclusion

En art-thérapie, la personne qui utilise le collage, comme mode d’expression, va indiquer, par ses choix d’images, la direction de l’accompagnement (Landgarten, 1994). Si cet article vous a convaincu, je vous attends à partir du 5 décembre tous les jeudis à partir de 13h30 dans le local d’art pour découvrir votre processus créateur. Vous pourriez y découvrir comment le collège peut vous aider à créer une vie satisfaisante.

 

 

Références:

Landgarten, H. B. (1994). Magazine photo collage as a multicultural treatment and assessment technique, Art therapy, 11:3, 218-219. DOI: 10.1080/07421656.1994.10759089

Lusebrink, V.J. et Hinz, L. (2022). Expressive Therapies Continuum as a framework in the treatment of trauma. Dir, Juliet L. King, Art therapy, trama, and neuroscience: Theoretical and practical perspectives. Routledge.

Stallings, J. w (2016). Collage as an expressive Medium in Art Therapy. Dir: David E. Gussak and Marcia L. Handbook of Art therapy. John Wiley & Sons.

L’art de se réaliser

Vous êtes-vous déjà dit « Moi je ne sais pas créer, ni dessiner » ou « ce n’est pas pour moi ces affaires-là » ? Cet article est pour vous. Le pouvoir de créer et être l’artiste de votre vie est un droit de naissance. Parfois, il s’agit de se demander : Si j’ai pu exister et réussir à me débrouiller malgré les difficultés de la vie, que puis-je accomplir d’autre que j’ignore ?

Se mettre en action

Le premier truc simple pour activer votre créativité, c’est de prendre un moment pour aller marcher seul (Doudet, 2024). Pourquoi marcher seul ? Parce que cela permet de vider votre esprit, sans ajouter de nouvelles distractions. Si la marche ne vous convient pas… dansez, chantez ou prenez du temps pour vous. Il est important que cela soit un moment plaisant pour vous.

La routine pour nourrir la créativité

Le Larousse définit le mot créer par : « réaliser ou concevoir quelque chose » (Larousse, 2025). Avant de créer, on commence par identifier ce qu’on aime ou un domaine qui suscite le désir de créer. Est-ce la décoration, la cuisine, écrire des textes, la photographie, le dessin, animer des ateliers ou la menuiserie ? Pour d’autres, c’est la danse, la musique, la couture ou l’improvisation. Bref, cela dépend de vos intérêts. Lorsque vous avez identifié ce que vous souhaitez créer, il reste à identifier comment, avec quoi, apprendre et pratiquer. Pratiquer quotidiennement. Vous ne savez toujours pas : explorez. Plusieurs des usagers du CAFGRAF démontrent déjà leurs aptitudes à se créer une vie satisfaisante en participant à des activités de groupe qui leur font du bien. D’autres en participant à des sorties qui les sortent de leurs zones de confort et leur permettent d’explorer.

Écrire ou dessiner pour se libérer

Oui, c’est difficile de trouver le temps le matin pour libérer son esprit en écrivant les 3 pages pour mettre en train sa créativité (Cameron, 1992). Un peu de patience et les mots inspirants finissent par venir (surtout quand on ne se préoccupe pas des fautes d’orthographe). Quand je le fais, j’écris tout ce qui me passe par la tête. C’est un peu comme une méditation écrite.

Rêver pour se créer

Le blogue Créativité et mieux-être (Lecours, 2025) transmet la définition de la créativité : « capacité, pouvoir qu’a un individu de créer… d’imaginer et de réaliser quelque chose de nouveau ». J’ai appris en art-thérapie que l’imagination était le plus grand pouvoir de l’être humain. Pour imaginer, on a besoin de faire de la place à l’intérieur de soi par l’exercice physique, la méditation, l’écriture ou toute autre activité agréable qui vous donne la sensation de vous aérer. Puis, on regarde notre capacité de créer sous un autre angle. On peut commencer par se dire
« si j’essaie, je me demande ce qui pourrait arriver ». Un de mes auteurs préférés dit que le processus de création est ce qui est le plus important (Gosselin, 2005). En effet, c’est au cours du processus qu’on voit comment l’art arrive. J’ai souvent vu cela au CAFGRAF, que ce soit en cuisine, au centre de jour ou encore lors des ateliers d’art-thérapie. Je vois la créativité à l’oeuvre quand vous laissez faire vos mains et vous vous laissez un peu de place à vous exprimer.

Cela m’arrive aussi d’être exigeante avec moi-même, de ne plus croire en mes capacités. Avec la pratique, je me rends compte combien ces périodes d’incertitudes sont importantes. Tolérez cet inconfort, osez vous remettre en question. Avec le temps vous verrez ce qui va émerger. Bien avant d’être art-thérapeute, j’écrivais combien j’avais besoin que la vie m’amène ailleurs que ma carrière de l’époque. J’ai eu de l’aide pour le découvrir, puis j’ai décidé de faire des changements et de l’espace. Le parcours pour me réaliser a été long, mais ce fut un voyage tellement enrichissant. Je me suis permie d’être moi et d’apprendre ce que j’avais le goût d’approfondir. Sans le savoir j’étais en train de faire de « l’art existentiel » (Boutet, 2023), je travaillais à ma propre réalisation. Tout ce que je savais, c’est que je voulais créer avec mes mains et être en relation avec d’autres personnes.

Conclusion

Vivre une vie enrichissante est à votre portée. Prenez le risque de regarder votre vie sous un autre angle et identifiez ce que vous voulez vivre pour le reste de votre vie. Pour moi, c’est là que le travail (enrichissant) a commencé. Aujourd’hui, avec vous je vis une vie que j’ai d’abord imaginée et rêvée. À travers le centre de jour, je suis témoin de vos élans créateurs en création individuelle ou collective. Je suis témoin de comment cela contribue à une vie collective Cafgrafienne satisfaisante.

Références

Boutet, D. (2023). L’intelligence de l’art : Regard sur les principes organisateurs de l’expérience artistique. Presses de l’Université du Québec.
Cameron, J. (1995). Libérer votre créativité : la bible des artistes. J’ai Lu.
Doudet, C. (2025). Comment être créatif au quotidien. Caroline Doudet. com https://carolinedoudet.com/2024/11/11/comment-etre-creatif-au-quotidien/
Lafont, D. (2025). Comment nourrir sa créativité au quotidien. Les éditions la plume assumée. https://dlrevision.com/comment-nourrir-sa-creativite-au-quotidien/
Lecours, N. (2025). Créativité au quotidien : 8 situations. Créativité et mieuxêtre. https://creativiteetmieuxetre.com/creativite-au-quotidien-8-situations/